03 Août Au nom des femmes
Le 24 juin 2022. La Cour suprême a décidé de révoquer l’arrêt « Roe v. Wade », retirant le droit à l’avortement à des centaines de milliers d’Américaines, et ce quelles que soient les conditions de leur grossesse.
Désormais, chaque État est libre de faire son choix. Et beaucoup ne se sont pas fait attendre. Une dizaine d’entre eux ont déjà interdit l’IVG. Un droit obtenu non sans efforts en 1973. Comment la plus haute cour constitutionnelle d’un pays aussi moderne peut-elle revenir ainsi sur un droit essentiel datant de plus d’un demi-siècle au profit d’un courant si réactionnaire ? Que peuvent bien penser toutes ses femmes qui ont bataillé pour que nous puissions disposer librement de notre corps ? Nos libertés sont bel et bien menacées d’un retour en arrière, là-bas comme partout, en voici la preuve accablante. Qu’en est-il justement aujourd’hui du droit à l’IVG dans le droit français ? Son fondement initial, c’est la « Loi Veil » de 1975, un texte qui est venu dépénaliser l’avortement, initialement pour une durée de cinq ans et dont les dispositions et les différentes évolutions sont depuis inscrites dans le code de la Santé publique. Des dispositions de nature législative. Qui peuvent donc être défaites par une autre loi. Je ne peux que penser aux mots clairvoyants de Simone de Beauvoir qui répétait à qui voulait l’entendre combien nos droits étaient fragiles, toujours à défendre. L’interruption volontaire de grossesse n’est pas un acte de confort ! C’est une décision que l’on porte à jamais en soi. Et de quel droit empêcherions-nous une victime de viol ou d’inceste d’interrompre une grossesse non désirée ? Messieurs et madame la juge, qui avez voté, vous semblez avoir oublié une chose pourtant si fondamentale : interdire l’avortement n’a jamais empêché une seule femme d’avorter. Elles le font quand même, mais en se mettant en danger. Une femme meurt toutes les neuf minutes dans le monde d’un avortement clandestin. Je suis française, mais aujourd’hui je suis américaine. Parce que je suis une femme. Et s’il vous plaît messieurs, en 2022, le combat pour l’IVG ne concerne plus seulement les femmes. Vous êtes concernés autant que nous. Faites-vous entendre.