Jeanne-Marie Latour, « La belle Montpelliéraine »

Native d’Aigues-Mortes, Jeanne-Marie Rudavel a seize ans lorsqu’elle épouse à Montpellier Vincent Latour, un marchand de vin apothicaire. Comme le couple a des ressources modestes, Jeanne-Marie est obligée de travailler. Elle devient marchande de mode itinérante.

À Paris, elle rencontre deux aventuriers, Louis de Castelbajac et un Autrichien, le comte de Schwerin, qui devient rapidement son amant. Plutôt téméraire, la jeune femme embarque avec eux pour l’Angleterre. En 1763, à Londres, elle distrait les joueurs que les deux fripons entendent plumer. C’est à cette période qu’elle rencontre le célèbre Casanova. Elle le retrouvera trois ans plus tard à Leipzig où elle deviendra sa maîtresse. Mais la belle a le mal du pays et en décembre 1766, Casanova lui offre le prix de son retour à Montpellier. En 1769, ils se reverront une dernière fois à Montpellier où Casanova séjournera une dizaine de jours avant de poursuivre sa route vers l’Italie. Des retrouvailles qu’il raconte dans ses mémoires. « Je désirais vivement retrouver la Castelbajac, beaucoup plus pour me réjouir de son état prospère ou pour partager avec elle le peu que je possédais que dans l’espoir de renouveler nos anciennes liaisons, mais je ne savais comment faire pour la découvrir. Je lui avais écrit sous le nom de Madame Blasin mais elle n’avait point reçu ma lettre parce que c’était un nom en l’air qu’elle s’était donné et qu’elle ne m’avait point confié son nom véritable ».

Déterminé à la revoir, il fait le tour de toutes les boutiques d’apothicaires de Montpellier. Finalement elle l’aperçoit et lui envoie un billet à l’auberge du Cheval Blanc, un établissement réputé au XVsiècle. Ils mettent au point un stratagème pour ne pas inquiéter le mari. Casanova arrive à la boutique à une heure précise, Jeanne s’y trouve et feint la surprise. Le séducteur raconte au mari qu’il l’a rencontrée chez une duchesse en Angleterre. Le Vénitien est invité par le couple à rester quelques jours de plus à Montpellier.

Ni l’un ni l’autre ne souhaite renouer des amours clandestines. « Je me suis plu ces quatre jours dans la joie pure de la pleine amitié, sans que le souvenir de la douce vie que nous avions faite ensemble pût avoir la force de réveiller en nous le désir de la renouveler ». Elle lui propose cinquante louis pour continuer son voyage, il refuse. Il écrira : « Je partis de Montpellier certain que ma visite avait augmenté l’estime que son mari et sa belle-mère avaient pour elle et je me félicitais en voyant que je pouvais me sentir véritablement heureux sans commettre des crimes » … Parfois présenté comme un malhonnête fornicateur, il démontre ici un caractère attachant et bien plus humain qu’on ne l’imagine. Personnage jouisseur et exubérant, il vécut en homme libre, tant de pensées que de comportement tout au long de sa vie.

Appelée souvent « la Castelbajac » ou « Mme Blasin », il faudra attendre la fin du XXe siècle et le bicentenaire de la mort du Vénitien pour que la belle Montpelliéraine recouvre son identité.

 

Sources : https://fr.wikipedia.org/wiki/Jeanne-Marie_Latour
https://www.unitheque.com/voyage-casanova.-travers-catalogne-roussillon-languedoc/nouvelles-presses-languedoc/Livre/188000
http://bvemagenta20.blogspot.com/2019/05/casanova-en-languedoc.html