Le Carré Mer, un lieu unique

C’est une institution locale. Un lieu unique où le temps s’écoule comme nulle part ailleurs. On y vient pour déjeuner, se prélasser sur un confortable transat bercé par le clapotis des vagues, pour boire un cocktail les pieds dans le sable ou pour dîner le soir venu.

Selon Christian Collot, « Ici on oublie tout le reste et on se fait plaisir ». C’est lui qui est en charge de la décoration du lieu. Une scénographie un peu à son image, généreuse, chaleureuse, enivrante. « Je dois vous avouer que j’ai un lien très particulier avec le Carré Mer. C’est mon patient zéro, c’est là que tout a commencé », précise le décorateur. Durant plusieurs années, Christian s’occupe ici de la réception et de la clientèle. À l’époque le Polynésien a la chance de faire de nombreux voyages. « En voyageant, je me suis aperçu que le niveau de l’assiette ne correspondait pas à la décoration. Ailleurs dans le monde, je découvrais des plages incroyables faites de bric et de broc. Alors un jour, j’ai proposé mes services, tout simplement et gratuitement, juste pour le plaisir. » Christian prend alors en charge la décoration du lieu, lui qui n’avait jamais pensé une seule seconde être décorateur. « C’est de cette manière que les portes se sont ouvertes à moi et que l’on m’a proposé d’en faire un métier. »

Son fil conducteur ici a toujours été le voyage. « Je veux qu’on ait l’impression d’être à l’autre bout du monde. Depuis de nombreuses années, nous étions sur un esprit cabane chic immaculée. Avec cette nouvelle direction artistique, il n’était pas question de changer l’âme du lieu, mais de lui donner un coup de botox ! (Rires) D’apporter quelque chose de nouveau ».

Christian brise les codes, mélange les matières, les textures, le moderne et l’ancien. Mais aussi les inspirations, tantôt africaine tantôt polynésienne – un clin d’œil à ses origines –, en respectant une certaine colorimétrie. C’est ce qui fait que le tout matche ensemble. « Je suis passionné par la mode, comme je le dis souvent le matin je ne m’habille pas, je me déguise. Cela influence mon travail. C’est pour cela que je me suis dirigé vers quelque chose à la Jacquemus. Du beige, du rose, du terracotta, des tons clairs. Je voulais briser le blanc de ces dernières années. » Plus que de la décoration, Christian crée de véritables scénographies. « J’aime faire des décorations qui sont instagrammables, un client qui entre et qui s’arrête pour prendre une photo, et j’ai tout gagné. Quelque part ça humanise mon travail. » À l’intérieur, le quadragénaire a choisi de mettre en avant un végétal sec. « J’ai travaillé le feuillage et la fleur séchés pour apporter des changements. » On retrouve tout de même les fameux tapis dessinés au sol. « C’est quelque chose que j’ai vu à Bali, dans un restaurant. Il était tout petit en forme de paillasson, au niveau de l’entrée. J’adore faire ça. J’aime montrer que la déco, ce n’est pas toujours une question d’argent mais aussi d’idées. Le fait d’assumer ces franges irrégulières montre que n’importe qui peut le faire. » L’établissement des frères Jacques et Laurent Pourcel ne déroge pas à l’excellence qui a fait la réputation des chefs étoilés. Côté restaurant, on vient pour déguster midi ou soir une cuisine bistronomique simple et raffinée. Des assiettes aux saveurs du Sud et de la Méditerranée. « J’adore la pièce de thon, en référence à mes origines polynésiennes. Mais j’ai un affect tout particulier pour le demi-poulet jaune fermier car il est mariné et désossé, c’est mon côté enfant ! Je suis un Peter Pan qui ne grandit pas ! (Rires) ». Au bar, on peut déguster de délicieux cocktails concoctés avec passion et originalité. « La piña colada est à tomber ! Elle est onctueuse comme un milkshake ! » Une chose est sûre, notre décorateur n’a pas fini de faire parler de lui. Et même au-delà de nos frontières. S’il est en charge du nouveau siège social d’Altrad, un palais aux inspirations d’Orient, il participe plus discrètement à la réhabilitation d’un bâtiment historique aux États-Unis, une ancienne maison close à laquelle il redonne ses lettres de noblesse. Plume, pompon, velours, pampille, art nouveau… le résultat d’ici trois ans.

 

Texte Marie Gineste
Photos@ Charlène Pélut