19 Juil Mode : Éthique, durable, bio, recyclée…
Serions-nous en marche pour une mode plus responsable ?
Parce que la qualité d’un vêtement ne se résume pas à sa coupe ou à sa matière, de plus en plus de personnes se tournent vers ce que l’on appelle aujourd’hui la mode écoresponsable. Une nouvelle façon de créer des vêtements et de faire son shopping, qui privilégie le respect de la planète et des personnes. Il faut dire qu’à force de produire toujours plus et plus vite, la mode est devenue la deuxième industrie la plus polluante du monde. Elle a donc bel et bien un rôle à jouer dans l’avenir de notre planète. Et elle le sait. Les acteurs du secteur œuvrent désormais pour plus de transparence et une meilleure utilisation des ressources. Acheter moins et mieux, favoriser le circuit court et l’artisanat, créer ses vêtements, les chiner, les revendre… autant de solutions qui pourraient bien faire la différence. La mode nouvelle génération chercherait-elle donc à être désirable mais surtout plus éthique ? Si cela semble être un concept récent, il n’en est rien. Certains se penchent sur la question depuis déjà plusieurs décennies. Comme Stella McCartney, l’une des figures de proue de la mode éthique, qui en refusant de travailler le cuir et la fourrure, crée une petite révolution au début des années 2000, une époque où une majeure partie du monde ferme les yeux sur les dérives et les effets néfastes de cette industrie. Des marques appliquant la philosophie du slow fashion à la lettre aux grands groupes déclinant leur offre pour surfer sur la tendance, désormais tout le monde veut sa part du gâteau. Qu’ils soient sur le devant de la scène ou derrière, ils sont désormais nombreux à œuvrer pour une évolution des mentalités dans l’industrie textile, conscients des enjeux éthiques et environnementaux que présente la mode. C’est le cas des Montpelliéraines Alexia, Claire et Charline. Créatrices et entrepreneures, elles sont aussi les actrices de ce changement pour une mode éthique.
Alexia, fondatrice de Pirouette & Salopette, des boxes de vêtements éthiques pour bébés
EMMA : Expliquez-nous votre concept…
Alexia : Je suis juriste de formation, mais après quelques années en tant que salariée, j’ai eu envie de me lancer dans une aventure entrepreneuriale autour de la mode éthique. C’est comme cela que j’ai créé Pirouette & Salopette, une marque désireuse de favoriser le développement de la mode éthique des petits bouts grâce à un mode de consommation responsable et innovant basé sur l’économie circulaire. Concrètement, je propose des mallettes qui contiennent sept vêtements, tous composés de coton issu de l’agriculture biologique et appartenant à des marques éthiques et engagées. La mallette peut être achetée ou louée et être composée de vêtements neufs ou déjà aimés en seconde main. La location est mensuelle et sans engagement, et le retour d’une mallette achetée s’accompagne d’un joli bon d’achat de 25 euros grâce à la consigne.
EMMA : Pourquoi avoir fait le choix de vous diriger vers un concept plus responsable, durable et éthique ?
Alexia : Cela correspond à mes valeurs et à ce que je recherche en tant que consommatrice. Je suis persuadée que la mode éthique a de beaux jours devant elle. Elle doit toutefois, à mon sens, s’accompagner d’un mode de consommation responsable basé sur l’économie circulaire pour être accessible au plus grand nombre.
EMMA : Quelles sont les contraintes ? Et quels sont les avantages ?
Alexia : Avec ce concept, j’ai souhaité bâtir un nouveau mode de consommation pour l’achat de vêtements pour bébés. Je pense que la principale contrainte réside dans cette nouveauté car le marché n’est pas encore mature. L’arrivée d’un bébé s’accompagne souvent d’une consommation déraisonnée de vêtements neufs dits « conventionnels ». Les avantages sont nombreux cependant. L’achat d’une mallette Pirouette & Salopette permet de payer moins cher sept vêtements éthiques (entre 30 et 100 € moins chers), de découvrir de jolies marques aux engagements très forts tout en gagnant du temps. On s’occupe de tout : envoi et renvoi des mallettes, nettoyage, remise en état des habits puis dons à des associations lorsqu’ils ne peuvent plus être glissés dans les mallettes.
www.pirouette-salopette.fr IG : @pirouette_et_salopette
Claire, Fondatrice de Pop’line, une marque de créateur de lingerie dessus-dessous et de vêtements casual-chic dans un esprit cocooning et bio.
EMMA : Expliquez-nous votre concept…
Claire : Nous sommes en 2010. Je suis à la recherche d’une lingerie avec des matières éthiques, très confortable, que l’on peut porter à la maison ou au dehors. Une alternative aux brassières de sport, mais beaucoup plus féminine. Eh bien, cela n’existe pas ! Il y a soit de la lingerie rembourrée et très sexy, pas forcément adaptée pour tous les jours, soit de la lingerie en coton blanc très juvénile. C’est à ce moment-là que je décide de créer mes premiers modèles POP’LINE (en référence à la popeline de coton), une gamme de lingerie confortable, sans armatures, en Dentelles de Calais et en matières naturelles. Mais aussi une gamme de Homewear avec des caracos, des kimonos et des bodies en cotons biologiques certifiés GOTS, en Tencel (fibre d’eucalyptus), en modal, en soie… En 2012, je crée une gamme de culottes froufrous en véritable Liberty de Londres et en coton biologique. Puis quelques maillots de bain en fibres éconyl (filets de pêche recyclés), et enfin une gamme de lingerie et de Homewear « Nuit de Noces » pour accompagner les mariées !
EMMA : Pourquoi avoir fait le choix de vous diriger vers un concept plus responsable, durable et éthique ?
Claire : Pour moi, cela a toujours été une évidence de travailler avec des matières naturelles et biologiques, je voulais des matières saines et agréables au contact de la peau. Si j’utilise principalement des Dentelles de Calais pour leur douceur incomparable, elles sont toujours issues de fins de stocks de grands dentelliers français, pour n’utiliser que des matières déjà existantes. Et puis c’est un savoir-faire français, j’y tiens beaucoup. Je réutilise les chutes de tissus afin d’en faire des pochettes pour y glisser les culottes. J’opte pour des étiquettes satin en polyester recyclé ainsi que pour le packaging en carton recyclé. Je fabrique également des pochons de lavage pour protéger sa lingerie, à partir de matières upcyclées. Du dessin à la confection en très petite série, chaque modèle est fabriqué dans mon atelier à Montpellier, L’Ateliées, un collectif de créatrices artisanes, qui regroupe en un même lieu une boutique partagée et huit ateliers en arrière-boutique. Je sous-traite une partie des culottes froufrou dans un atelier local. Et puis je confectionne pour l’instant, principalement à la demande, sur le site internet et en boutique pour éviter les surstocks et ne produire que le nécessaire.
Emma : Quelles sont les contraintes ? Et quels sont les avantages ?
Claire : En lingerie, il y a beaucoup de contraintes, c’est un univers très technique et il est difficile de faire « tout » éthique, il y a du lycra partout. C’est une grande évolution pour le confort des femmes mais beaucoup de matières sont encore polluantes. En ce qui concerne les élastiques et les bretelles, pour l’instant il n’y a pas d’alternative écoresponsable, et c’est très frustrant lorsque l’on a les idées mais que l’on ne peut pas aller jusqu’au bout. J’ai vraiment eu du mal au début à trouver les matières premières, car les cotons biologiques existaient principalement pour le textile enfant, avec des motifs coccinelles et papillons. Heureusement, depuis, l’offre s’est étoffée mais il y a encore des progrès à faire dans le secteur de la lingerie. C’est un challenge de travailler avec des matières éthiques et de toujours s’améliorer pour trouver des matières plus responsables, c’est une grande satisfaction de pouvoir proposer des modèles jolis, confortables, dans une démarche raisonnée et éthique. C’est aussi un mouvement qui va vers un mode de vie plus « slow », accepter son corps, la forme de sa poitrine telle qu’elle est. Beaucoup de clientes sont à la recherche de confort, surtout depuis le confinement. Certaines veulent quitter les armatures mais ne sont pas prêtes à ne rien mettre du tout. D’autres se dirigent vers le mouvement « No Bra », c’est-à-dire sans soutien-gorge, mais ont besoin d’une étape intermédiaire, Pop’line les accompagne vers cela.
www.poplinelingerie.fr IG : @poplinelingerie
Charline, fondatrice de reHer, une marque de prêt-à-porter féminin made in France, éthique et écoresponsable
EMMA : Expliquez-nous votre concept…
Charline : J’ai lancé mon aventure en 2020 en créant ma propre marque de prêt-à-porter, reHer, pour contribuer à une mode plus respectueuse de l’humain et de l’environnement. Une marque qui s’inscrit dans le mouvement de la slow fashion et qui se veut être l’alternative éthique et éco-engagée pour toutes les femmes qui veulent agir maintenant. L’objectif de reHer est de proposer une garde-robe à la fois tendance et éthique, pour que toutes les femmes désireuses de changer de mode de consommation textile n’aient pas de choix à faire entre style et engagement. Nous créons deux collections à l’année de huit essentiels de la garde-robe féminine produits en cent exemplaires chacun. Nos fournisseurs sont européens et notre atelier de fabrication est français. Les matières que nous utilisons sont issues de fibres naturelles certifiées GOTS ou BIO. Nous excluons donc toute matière chimique et tout composant issu du pétrole.
EMMA : Pourquoi avoir fait le choix de vous diriger vers un concept plus responsable, durable et éthique ?
Charline : Je suis atteinte d’une endométriose depuis mes 25 ans, mon mode de vie et mon bien-être ont pris une place primordiale. En conséquence, ma façon de manger, de me maquiller, de prendre soin de ma peau ont énormément évolué. Et ce, même dans ma manière de m’habiller ! Alors sensible à toutes ces problématiques et consciente que le changement ne se fera que par des actions concrètes et porteuses de sens, j’ai créé reHer en lui insufflant des valeurs et des engagements soucieux des enjeux humains et environnementaux.
Emma : Quelles sont les contraintes ? Et quels sont les avantages ?
Charline : Le challenge majeur pour une marque de prêt-à-porter écoresponsable c’est de réussir à proposer à la fois une pièce mode et tendance tout en tenant compte de toutes les “contraintes” que nous nous sommes données comme cahier des charges. Les contraintes sont celles des choix à effectuer en matière de tissus, de partenaires ou encore de modes de livraison. Ces choix sont compliqués car nous sommes exigeants pour rester en phase avec nos engagements et nos valeurs. A contrario, les avantages consistent dans le fait de travailler pour un projet en harmonie avec nos valeurs. D’être sûrs de proposer une pièce mode, de qualité et respectueuse de l’homme et de la planète. Enfin d’avoir une communauté unie par les mêmes aspirations, les mêmes attentes et les mêmes exigences. Finalement reHer c’est bien plus qu’une marque de « fringues », c’est un univers de valeurs porté autour du respect, du partage et de l’accompagnement à un mode de consommation plus « slow ».
www.reher.fr
IG : @reher_fr
Texte Marie GINESTE